Extrait tiré du livre Écoute, ma mie publié par Cécile Lachaîne-Brosseau (Tante Chantal). Ottawa. 1961. De la collection de Thérèse.
Comment pourrions-nous parler «mode» sans aborder la «modestie»? Puisqu’il a déjà été question du port du pantalon, nous commencerons par détailler ce qui constitue la modestie du pantalon: sa coupe d’abord. Je comprends que certains de vos professeurs s’insurgent contre cette mode et si vous portez ces jeans serrés, plus provocants qu’un vrai déshabillé, je suis d’accord avec eux. D’accord avec eux encore, si aussitôt la classe terminée vous vous empressez de passer un pantalon pour vous promener dans le village ou la grande ville que vous habitez. Je t’avoue qu’il n’y a rien de plus choquant pour le bon goût que d’apercevoir, par exemple, des jeunes filles attifées de jeans sur la rue Sainte-Catherine ou dans les grands magasins. Je le répète, le port du pantalon doit être occasionnel. Pour la bicyclette, le ski, le patin, l’équitation, si tu veux être élégante, il faut que la coupe de ton vêtement soit ample, alors, tu seras vraiment modeste. Il en va de même des tricots et des jupes, un ajustement trop serré en fait des vêtements aussi immodestes que ridicules. Et ne va pas croire que seule la religion soit en cause: l’esthétique, le bon goût et le simple bon sens proscrivent ces exagérations. Je t’assure que certains décolletés n’ont rien d’élégant; des manches trop courtes, trop ouvertes sous le bras n’offrent rien de bien joli non plus. Quant aux robes trop étroites et trop courtes, il suffit de s’asseoir pour en comprendre tout le grotesque.
Te parlerai-je de shorts? Le port en est strictement interdit par nos évêques. Et je comprends pourquoi. Il y a eu tellement d’abus qu’il a fallu sévir. Ce vêtement qui peut remplacer le maillot de bain à la plage, les jours où tu ne peux te baigner, est devenu un tout-aller qu’on porte même en ville et j’ai vu des shorts si indécents que je comprends la prudence de notre clergé. Heureusement, depuis quelques années, la mode est aux pantalons plus longs, aux genoux. Pour le tennis, le badminton, la plage, je le trouve très convenable; porté avec le bas trois-quarts cela fait un ensemble assez «petit-garçon». Mais n’en abuse pas. Conserve partout cette féminité que Guy de Larigaudie souhaite: «Mon Dieu, faites que nos soeurs les jeunes filles soient harmonieuses de corps, souriantes et habillées avec goût.»
J’allais oublier … si tu portes de ces robes en tissu léger et diaphane, je t’en prie songe à la confection d’un dessous convenable, opaque, voilà encore une faute de goût qui se répète trop souvent: rien de plus inélégant que de pouvoir détailler une silhouette qui marche dans la lumière ou dénombrer les multiples bretelles du corsage. Taille-toi un bon vêtement avec une épaulette raisonnable qui camouflera camisole, etc., un joli décolleté arrondi dans un tissu opaque: satin mat ou mieux, taffetas; te voilà en sécurité et belle par-dessus le marché. Comme tu peux le constater la modestie n’est pas incompatible avec la mode. Quand tu seras tentée de faire des imprudences, rappelle-toi cet avertissement formulé par le regretté Pie XII: «Tant que certaines toilettes provocantes restent le triste privilège des femmes d’une réputation douteuse et comme le signe qui les fait reconnaître, nul n’osera les adopter; mais dès qu’elles seront portées par des personnes au dessus de tout soupçon, on n’hésitera plus à suivre le courant qui entraînera peut-être aux pires chutes.» Attention, ma mie, à tes responsabilités de jeune fille bien élevée et chrétienne en plus.