Extrait tiré du livre “Connaissance de l’amour” publié par Marcelle Auclair. Paris. 1960.
Nous en connaissons tous, des femmes qui, pourvues d’une situation indépendante, sont aussi indépendantes dans l’amour et multiplient les aventures, comme l’homme.
Il n’y aura aucune raison valable à leur opposer, tant que la société n’imposera à l’homme aucune restriction. Les raisons morales qu’on pourrait faire valoir ne sont pas plus fortes en ce qui les concerne que pour leurs partenaires masculins.
Les «conséquences», ou, pour les appeler par leur nom, les enfants? Elles les «évitent», ou les élèvent; et là, elles acquièrent une dignité que l’homme n’a pas, lui qui, neuf fois sur dix, refuse de s’intéresser au produit de ses amours autrement qu’en prenant la fuite.
Sont-elles heureuses? Le bonheur de ces «Don Juanes» est affaire de caractère; elles peuvent éprouver un simili-bonheur dans la mesure où elles sont inconscientes, futiles, et jusqu’au jour où il ne leur reste de leur jeunesse qu’un vif regret. La femme qui a atteint une situation où elle jouit à la fois de prestige et d’argent finira par acheter l’amour au prix de ce prestige et de cet argent, tout comme l’homme mûr. Et ça n’est pas très gai. Et ça n’est pas très brillant. Ne leur déplaise. Car toutes celles que j’ai connues dans ce cas-là mettaient leur orgueil à ne pas reconnaître qu’en fait, comme je l’ai déjà dit, être une femme libre, c’est être une femme seule.